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Aicó rassemble trois musiciens issus d'horizons différents, tout d'abord: Hans Koch, clarinettiste suisse très remarqué depuis les années 80, notamment pour sa présence au sein de l'Hardcore Chamber Music (trio qu'il fonde avec Fredy Studer et Martin Schütz), puis Thomas Rohrer et Antonio Panda Gianfratti, deux artistes brésiliens que j'entends pour la première fois. Bien sûr, ces trois pièces sont aventureuses et originales comme la plupart des publications de Creative Sources, mais elles possèdent surtout une énergie remarquable et un son magnifique comme on a que trop rarement l'occasion de l'entendre.

La première pièce d'Aicó forme un dialogue énergique entre les deux vents et la batterie, un dialogue puissant qui se rapproche du free jazz par l'intensité, et du réductionnisme par la richesse du timbre et l'utilisation de diverses techniques étendues (souffle continu, slap, multiphoniques). Aucune contrainte ne semble entachée l'énergie de cette pièce, l'espace sonore -vaste et aéré- est formé de phrases rythmiques, mélodiques, abstraites, dialogiques, où l'immense spontanéité de chacun n'est limitée que par l'écoute et l'attention à l'autre. Progressivement, les interventions se font de plus en plus condensées, puissantes et intenses, jusqu'à ce que la tension atteigne une force décuplée par la présence joyeuse qui affecte ce trio.

La deuxième pièce se déploie quant à elle en trois temps durant 25 minutes. La première partie se compose de strates abstraites qui se superposent et s'enchevêtrent: harmoniques, cymbales frottées et souffles vivent en symbiose dans un son unifié et une dynamique homogène qui laisse place à l'individualité de chacun: un véritable processus d'individuation au sein d'une musique communautaire. Les percussions se retirent alors progressivement pour laisser place à un duo aux allures ornithologiques fait de pépiements, de hululements et de cris de toutes sortes. L'homogénéité se trouve alors éclatée par les deux souffleurs qui créent durant cet deuxième tiers un pic aussi intense qu'aigu, aussi puissant que dispersé, tout en se maintenant dans un équilibre cohérent, tel un plateau escarpé au sommet d'une colline. Pour poursuivre cette analogie -aussi fumeuse soit-elle-, je dirai que la troisième partie est une redescente dangereuse et ardue vers la vallée. En fait, l'homogénéité et la dispersion des précédentes dynamiques fusionnent dans ce mouvement au dénivelé stable mais plein d'anfractuosités hétérogènes. La progression vers le silence et l'apaisement de la tension est régulière certes, mais la descente n'en est pas moins escarpée et mouvementée, l'unité du timbre est maintenue à travers la diversité des dynamiques et des énergies parfois volatiles.

Ce long mouvement paraît avoir laissé des séquelles sur la troisième pièce, également construite sur des nappes unifiées par leur caractère lisse et arythmique, mais quand même et toujours escarpées dans leurs mouvements. Il y a encore le même équilibre entre les trois individualités, mais la tendance à l'abstraction devient proéminente et ressert et tend l'espace. Tensions qui s'équilibrent néanmoins, car si l'interaction entre les différentes strates peut parfois être extrêmement tendue, le son global flotte plutôt dans un apaisement singulier et une sorte de satisfaction empreinte de plénitude, caractéristiques certainement dues en grande partie à la notion primordiale et fondamentale d'équilibre, très justement mise en œuvre durant ces trois pièces.

Aicó rassemble donc trois pièces variées, ouvertes et riches aussi bien bien dans leurs dynamiques et leurs mouvements que dans les formes de tensions et/ou d'équilibres, mais également, et surtout, dans les recherches sonores et musicales à l’œuvre dans l'exploration du timbre et des formes /structures possibles de dialogues, d'écoutes et de réponses, d'interactions interindividuelles et communautaires. Dans leur équilibre et leur joie, ces trois pièces semblent alors atteindre une forme de béatitude et de plénitude (complètement immanente à la musique) rarement présente dans l'improvisation qui se caractérise trop souvent par l'instabilité et une forte tension proéminente. Recommandé! hjulien (Improv Sphere)

Hans Koch plays soprano sax and bass clarinet along with Thomas Rohrer on another soprano and c-melody saxes and rebeca, (a type of violin) and Antonio Panda Gianfratti on percussion. The style these gentlemen display fits somewhere between the really quiet, minimal explorations and the older "European-style" improvisation. There's a lot of space and airiness in their playing, and at times a semblance to some of the 20th century composition school of John Cage or Christian Wolff. They never quite rise to the level of out and out free jazz, but do raise the energy level while following the tried and true quiet-andslow/ faster and louder/soft-and-end sequence that an awful lot of improvisers follow.
Along the way there's some very fine playing. During the first (unnamed) track, the horns dance around each other while the percussionist adds the weft to their warp. The contour of the piece is akin to a conversation that starts off politely and gradually becomes more animated as the group makes their interjections faster and with more emphasis. The second, longest piece stays in quiet mode much longer, eventually giving way to some upper-register squeaking that sounds remarkably like a duet between a bird and a tin whistle. Short punctuations from the drums announce a section of legato and overblowing before the whole structure topples and then wobbles to its feet again somewhat drunkenly.
There are big ears in evidence here, and there doesn't seem to be any hemming or hawing while waiting for the next idea to form. They just go straight from one thing to the next and manage to keep it all interesting melodically, rhythmically or timbrally. Later on there's a nice extended section of breathy sounds from the horns and shuffling whispers from the drums, which is capped by single whistle tones before a left turn into low-end warble and mid-range sput.
The final piece features bowed cymbal with pops and short notes from the horns. I can't tell how Gianfratti is causing the cymbal tones to waver like that. The whole piece is a bit more "abstract" than the preceding stuff, and shows a weird witty sense of humor without getting cutesy. The cymbals seem to slice the structure into bits, and at times the whole enterprise seems electronically made or manipulated. Lots of high/low juxtaposition and variations in density make for a very interesting capper.

Encore un enregistrement réalisé au Brésil en 2008 avec deux des principaux activistes de l'improvisation de Sao Paulo, le percussionniste Antonio "Panda" Gianfratti et le joueur de rebec Thomas Rohrer qu'on entend ici au sax soprano et au c-melody sax. Le troisième homme, le suisse Hans Koch est présent au clarone et au sax soprano. Commentés avec à propos par la percussion discrète de Gianfratti, les deux souffleurs se livrent à un dialogue tangentiel et contrapuntique, fait de rengorgements, de boucles rêveuses, de coups de bec, de variations de motifs qui s'imbriquent avec une belle fluidité sensible. Le percussionniste Entre les trois musiciens, l'écoute est profonde et le terrain commun est investi par de belles constructions dès le premier morceau (track 1) de 10 : 49. La deuxième pièce, plus longue (track 2, 25:07), plonge dans une recherche appliquée semi-silencieuse. On entend la clarinette comme dans un songe et le soprano vente à peine, entourés par les grattements et frottements aigus de la percussion. Les harmoniques de la clarinette (basse ?) tressautent quand les cymbales se froissent et que des sifflets autochtones ventilent des zézaiements ocellaires. Un univers poétique de timbres et de sonorités semble sortir tout droit de la forêt tropicale et transite par un duo de sax sopranos vers de superbes dérives partagées. Le troisième morceau développe son caractère propre et une autre manière de triologue avec l'entrée en scène du rabeca de Thomas Rohrer, un musicien qu'on a entendu à la Fête Quaqua de John Russell. Tout en maintenant leur approche sonore initiale et force frottements de cymbales à l'archet, ils font voyager le son d'ensemble dans un autre univers. Une musique collective basée sur l'écoute et la recherche de sons sans idée toute faite. J'apprécie beaucoup la sensibilité de ces artistes qui donnent à entendre une version renouvelée de l'improvisation libre "radicale" qui devient ici profondément humaine et poétique. Jean-Michel Van Schouwburg (Orynx-improv'andsounds)